OSSIA

Approche scientifique et technique

Le projet OSSIA, suite aux recherches menées au sein du projet ANR Virage, vise à proposer une solution unifiées aux problèmes des dichotomies entre cue-list et time-line d’une part et entre scénarisation temporelle et logique d’autre part, en offrant une time-line “multiple”, permettant d’agencer différentes couches de temps à l’aide de contraintes temporelles, de points de déclenchement et d’embranchements conditionnés. De plus, le contrôle exclusif de paramètres abstraits permet de rendre le temps “souple”, en faisant varier de manière indépendante ou hiérarchisée les vitesses d’horloge entre les différentes couches de temps ayant leur résolution propre.

Le projet OSSIA se propose de répondre à ces problématiques en produisant un ensemble de services logiciels pour l’écriture de scénario interactifs, implémentés sous la forme de prototypes pouvant alors être éprouvés par les praticiens participant au projet dans des contextes in situ. Ces prototypes prennent la forme d’un séquenceur interactif, i-score, et d’une boîte à outils pour l’interopérabilité permettant de communiquer avec le séquenceur.

La méthode de recherche est basée sur une confrontation permanente entre usages et théorie par l’adaptation continue des modèles formels et des syntaxes et représentations graphiques (UX&UI) en fonction des retours des utilisateurs. Sur la base des modèles formels définis et implémentés par les partenaires scientifiques (LaBRI), des applications prototypales et expérimentales sont développées par les ingénieurs des partenaires applicatifs (GMEA, Blue Yeti, CNAM, SCRIME et RSF), à destination d’un panel d’utilisateurs choisis par eux, afin de répondre aux besoins des situations (les “chantiers d’expérimentation”) présentant des conditions similaires à celles de production (artistique, muséographique, jeux vidéos), mais hors de la pression réelle d’une production.

Les partenaires applicatifs observent et accompagnent alors la prise en main des prototypes, notamment en leur apportant un soutien technique pour adapter leurs environnements logiciels habituels aux besoins de l’expérimentation.

Comme cela est représenté sur la figure ci-contre, cette approche permet des échanges et une négociation permanente entre utilisateurs (artistiques) et chercheurs (scientifiques) via les ingénieurs/développeurs.

Concrètement, cette démarche de recherche collaborative  a pris dans le projet la forme d’une conversation soutenue dans le temps entre les divers acteurs, à l’aide d’un dépôt de code partagé (github) et de listes de discussion, et réactivée régulièrement à l’occasion de séminaires trimestriels rassemblant à chaque fois pendant 2 à 3 jours scientifiques, ingénieurs et praticiens pour échanger autour des différents verrous scientifiques et techniques apparus au fil du projet, et pour en trouver les solutions collectivement.

méthodologie

C’est ainsi de ces échanges collectifs qu’ont pu émerger les solutions formalisées par les partenaires scientifiques du LaBRI concernant le principal verrou scientifique, à savoir la cohabitation de contraintes temporelles et logiques. La solution initialement proposée, suite à la thèse menée au LaBRI par Mauricio Toro, d’employer de manière mutuellement exclusive des scénarios ou bien temporels ou bien logiques a été rejetée par les utilisateurs, ceux-ci préférant un modèle plus général, permettant ainsi une plus grande puissance d’expression. Ce choix collectif a bousculé les propositions théoriques et a impliqué la recherche d’un nouveau modèle, basé sur une idée également présente dans cette thèse préalable : l’exécution silencieuse, qui a permis la création d’une nouvelle entité, l’événement conditionnel permettant alors d’unifier les deux modèles précédemment concurrents : logique et temporel. Le rapport de Myriam Desainte-Catherine explicite plus en détail les choix et processus qui ont eu lieu dans cette évolution du modèle théorique.

De même, tous les choix concernant la terminologie et la syntaxe de représentation implémentée dans l’interface graphique ont été faits lors de discussions collectives autour d’un tableau blanc, au fur et à mesure que les problèmes émergeaient, aussi bien dans l’évolution des modèles formels que dans leur implémentation dans le moteur d’exécution ou dans leur représentation dans l’interface graphique, ou encore suite aux expérimentations des prototypes par les utilisateurs, faisant ressortir des inadéquations entre une conception spéculative, et l’utilisation en situation réelle. L’article de Mireille Losco-Lena, chercheure en études théâtrales ayant suivi l’expérimentation du projet OSSIA dans le cadre du spectacle vivant expose en détail plusieurs aspects de cette expérimentation ainsi que la perception des utilisateurs. Comme cela y est exposé, un des points principaux concerne le besoin pour les utilisateurs d’avoir un outil stable – réquisit dans les faits difficile à concilier avec la dynamique forcément instable d’une recherche en cours.